Départ des troupes françaises en Afrique : Seul les États africains capables de décider par eux-mêmes ont décidés
Le 28 novembre 2024 restera gravé comme une date charnière dans l’histoire des relations franco-africaines. En ce jour symbolique, le Tchad et le Sénégal ont simultanément signifié leur volonté de voir partir les troupes françaises de leur territoire. Une décision historique qui signe la fin d’une époque et marque l’aboutissement d’un processus de désengagement militaire français du continent africain.
« L’armée française est présente de façon permanente au Sénégal depuis plus de deux siècles, précisément depuis la ‘récupération’ de Saint-Louis sur les Britanniques en 1814 ». La rupture intervient de manière spectaculaire avec le gouvernement tchadien qui annonce la fin de l’accord de coopération militaire avec la France, tandis que le président sénégalais Bassirou Diomaye Faye réclame le départ des soldats français, jugeant leur présence incompatible avec la souveraineté nationale.
Dès lors, cette double annonce s’inscrit dans un mouvement plus large de retrait militaire français du continent. Après la Centrafrique en 2015, le Mali en 2022, le Burkina Faso et le Niger en 2023, l’armée française est donc en passe de quitter ce qui lui restait de positions dans cette bande d’Afrique.
Au Tchad, la décision trouve une motivation particulière. Selon François Soudan, « le président Mahamat Idriss Déby Itno n’a jamais digéré l’absence de réaction du contingent français lors de l’assaut des rebelles sur N’Djamena, en février 2008 ». Cette rancœur personnelle s’ajoute à un sentiment anti-français grandissant dans la population.
Les bases militaires de Ouakam au Sénégal et de N’Djamena au Tchad, derniers vestiges d’une présence militaire post-coloniale, s’apprêtent donc à fermer leurs portes. Une présence qui, selon l’éditorial, constitue « une anomalie à laquelle les présidents Faye et Déby Itno avaient toutes les raisons de vouloir mettre un terme ».
L’éditorialiste met en garde contre une lecture simpliste de ces événements : « Plaquer sur ces derniers la grille de lecture de l’influence russe, devenue le kit prêt à l’emploi des services de renseignement français en Afrique […] n’a guère de sens ». Il souligne qu’il est possible de « vouloir le départ de l’armée française sans pour autant se jeter dans les bras d’un maître de substitution ».
Ce retrait militaire n’est qu’une première étape. La France doit maintenant affronter d’autres « chiffons rouges » de son passé colonial. L’éditorial évoque notamment « le massacre de Thiaroye, la sanglante répression des révoltes malgache et camerounaise, le génocide des Tutsis du Rwanda, la guerre d’Algérie ». Seul Djibouti conserve une justification stratégique pour maintenir des bases militaires françaises.
Cette rupture historique ouvre la voie à une nécessaire refondation des relations franco-africaines. Plus qu’une humiliation, ce départ forcé devrait être vu comme l’opportunité de construire un nouveau partenariat, débarrassé des vestiges de la colonisation et basé sur une véritable égalité entre les nations.