Les dix-neuf candidats n’ont notamment que deux semaines pour conquérir les votes des électeurs, contre vingt et un jours prévus par le code électoral.

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Les dix-neuf candidats n’ont notamment que deux semaines pour conquérir les votes des électeurs, contre vingt et un jours prévus par le code électoral.

Dans la soirée du lundi 11 mars, après la rupture du jeûne du ramadan, le candidat du pouvoir Amadou Ba a tenu son meeting officiel d’ouverture de campagne à Mbacké avec sûrement l’espoir d’y voir un heureux présage. C’est dans cette ville à 180 kilomètres à l’est de Dakar que le président Macky Sall avait entamé sa tournée du pays avant d’être réélu en 2019. Pour celui qui fut son premier ministre et espère lui succéder, le démarrage a été timide, en l’absence des poids lourds de la coalition de la majorité Benno Bokk Yakaar, après quelques mobilisations dans les banlieues de la capitale sénégalaise le week-end précédent.

« C’est une campagne raccourcie qui se tient dans un contexte de carême chrétien et musulman. Par conséquent, les grands meetings seront réduits au strict minimum et nous sommes davantage dans une démarche de proximité, de porte-à-porte ou de caravane », justifie El Hadj Hamidou Kassé, coordonnateur de la communication d’Amadou Ba.

Pour les dix-neuf candidats en lice, le début de campagne a commencé de façon précipitée après le mois d’incertitudes ayant suivi l’annonce surprise du report de l’élection présidentielle par Macky Sall. Alors que le 6 mars, le Conseil constitutionnel avait exigé du chef de l’Etat que l’élection se tienne avant le 2 avril, date de la fin du mandat présidentiel, la date du 24 mars a finalement été retenue pour la tenue du premier tour du scrutin. En conséquence, les candidats disposent de moins de deux semaines pour convaincre les Sénégalais de voter pour eux, contre les vingt et un jours prévus par le code électoral. Plus inédit, l’un des candidats et non des moindres, Bassirou Diomaye Faye, le remplaçant officiel d’Ousmane Sonko, est actuellement en prison. Comme son chef.

Cela n’a pas empêché des centaines de sympathisants d’accompagner dimanche au pas de course et en chantant les deux immenses camions à l’effigie du candidat du parti dissous Pastef (Patriotes africains du Sénégal pour le travail, l’éthique et la fraternité) et de son leader. « Ce n’est pas normal que tous les candidats soient dehors et qu’un seul reste derrière les barreaux », lance Mor Thiam, une écharpe aux couleurs du Sénégal nouée autour du cou.

« Une atteinte au principe d’égalité »

La campagne de Bassirou Diomaye Faye est d’autant plus complexe que celui-ci a été privé de son temps d’antenne réglementaire à la télévision publique RTS le premier jour de campagne. Le candidat étant en détention, son directeur de campagne Moustapha Guirassy s’était chargé de le remplacer sur sa vidéo de campagne de trois minutes. L’enregistrement a été finalement retoqué par le Conseil national de régulation de l’audiovisuel (CNRA) au motif que seul le candidat à la présidentielle peut y apparaître. Depuis, son parti se contente de diffuser des images de campagne et de rassemblements sur le terrain lors de temps d’antenne quotidien qui lui est dédié.

« C’est une atteinte au principe d’égalité car notre candidat est privé de présenter son programme », regrette M. Guirassy. Bénéficiaires présumés de la loi d’amnistie générale votée le 6 mars, Ousmane Sonko et Bassirou Diomaye Faye sont toujours dans l’attente de leur libération.

Autre particularité propre à l’ex-Pastef : deux autres candidats toujours dans la course à la présidence, Habib Sy et Cheikh Tidiane Dièye, défendent son programme. « Nous sommes dans le cadre global d’une coalition avec Bassirou Diomaye Faye, nous avons un projet commun que nous défendons lors de caravanes électorales communes », explique Habib Sy, dont la candidature a été validée grâce aux parrainages des députés du Pastef. « C’est une stratégie inédite face à cette situation inédite où son temps de parole lui a été injustement retiré par le CNRA », poursuit-il, tout en maintenant le flou sur le maintien de sa candidature en fonction de l’évolution de la campagne.

Une violation de la loi électorale ?

Mutique durant toute la période de troubles politiques qui a suivi le report de l’élection, Idrissa Seck, arrivé en deuxième position de la dernière élection présidentielle, est sorti de son silence lors de son entrée en campagne dans le quartier de Ouakam à Dakar. Présent à la signature d’une charte pour une pêche durable, l’ancien premier ministre d’Abdoulaye Wade s’est ainsi justifié : « Beaucoup se sont étonnés de mon silence face aux événements, mais lorsqu’on a foi en l’Etat de droit, il faut laisser l’exécutif décider et peut-être se tromper. Il faut laisser le législatif légiférer et peut-être se tromper et se soumettre en dernier ressort à la décision du juge constitutionnel insusceptible de recours. »

Une règle que le Parti démocratique sénégalais (PDS), dont le candidat Karim Wade a été écarté de la présidentielle, ne semble pas vouloir pleinement entendre. Le parti de l’ancien président Abdoulaye Wade a déposé lundi un recours devant la Cour suprême pour annuler le décret présidentiel qui fixe la date du scrutin le 24 mars. Le parti dénonce une violation de la loi électorale car le corps électoral n’a pas été convoqué quatre-vingts jours avant le vote et la campagne électorale pour le premier tour ne va pas durer les vingt et un jours réglementaires.

« Nous sommes dans un contentieux autour de l’élection présidentielle, donc c’est le Conseil constitutionnel qui est compétent et non la Cour suprême », assure le professeur de droit constitutionnel Babacar Gueye qui ne voit pas ce recours prospérer. « Il ne peut pas y avoir d’élection le 24 mars, nous n’allons pas l’accepter », rétorque un cadre du PDS. Après le report de l’élection présidentielle, poussé par la PDS, et les rebondissements judiciaires des dernières semaines, personne au Sénégal ne prend cette menace à la légère.

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