Les tonalités d’un discours
Elle était attendue, lui, avec. La Déclaration de politique générale et Ousmane Sonko. Le fond et la forme. Le texte et l’homme étaient épiés. Le discours serait-il consistant? Ousmane Sonko serait-il à la hauteur de l’évènement, lui le tribun qui fait se soulever des foules et qui, pour la première fois, se retrouve devant un tel cas de figure? Finalement, que faut-il retenir du discours du Premier ministre ?
Il serait bien fastidieux de vouloir le résumer en quelques mots. Surtout lorsqu’il décline les grandes lignes d’un projet de gouvernance qui embrasse tous les domaines de la vie économique, sociale, culturelle, sportive d’un pays sur un horizon temporel que les tenants du pouvoir actuel fixent sur 25 ans.
Ce qui est évident, c’est qu’il y a bien changement de voilure et de cap et la volonté de mener le bateau Sénégal à bon port est manifeste. Le Premier ministre l’a d’ailleurs martelé : lui et son gouvernement sont déterminés à « réussir le tournant de note histoire ». Ainsi, au-delà du diagnostic de la situation dans laquelle le régime actuel a trouvé le pays et des mesures de remédiation ou de redressement que Ousmane Sonko a partagé avec les députés, la dernière partie de son texte est celle qui rend compte le mieux de l’essence de son discours, de sa substantifique moelle.
Dans cette partie, le Premier ministre a mis du cœur, retrouvant un second souffle comme en témoigne la tonalité de sa voix qui a repris en ce moment-là de la vigueur alors qu’il venait de boucler deux heures de lecture marquée par des toussotements et quelques hésitations. Le rendu s’est fait par l’usage de l’anaphore à travers la répétition du mot « comment » cinq fois. « Comment » la croissance s’accélère ; « comment » les activités et les emplois formels se développent ; « comment » la pauvreté se réduit ; « comment », année après année, la qualité de vie des populations se transforme, « comment » notre Nation se renforce, se sécurise et rayonne dans le monde. Le choix de cette figure de style n’est pas anodin si l’on sait l’effet qu’elle donne à un propos.
En effet, la particularité de l’anaphore est de rythmer une phrase en réitérant un mot afin de donner plus d’énergie au discours ou de renforcer une affirmation, un plaidoyer, une urgence. Comme si dans sa déclaration de politique générale, le chef de gouvernement a voulu réserver le meilleur pour la fin. Le meilleur parce que c’est à cette étape qu’il a pris des engagements fermes et résolus qui devront se traduire par des « réformes nécessaires pour mettre le pays sur les rails du développement » et par la « mise en œuvre globale et coordonnée de chaque programme avec des objectifs clairs et des indicateurs d’effets et d’impacts précis ».
Et c’est là aussi qu’il dévoile sa méthode de gouvernance qui reposera sur une approche « agile » et « responsable », dans la « concertation et la conciliation toujours », dans « la compromission et la condescendance jamais » et dont la finalité sera une « transformation systémique du pays tant espérée par les Sénégalais ». Un ton, une tonalité, un tempo pour se projeter dans le temps d’un Sénégal où il fera bon vivre.